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HEPATITE C à l’Ile de la Réunion, les caractéristiques des patients dépistés récemment ont changé :
Des données importantes pour améliorer le dépistage des cas méconnus
Étude menée par :G. BELON a, T. CHANE TENGA a, H. AUDIN-MAMLOUKA a, M. DE BEAUREGARDA a, Y. BADATB b, C. FRANCOISA a, C. ROUSSINA a, AL. LE TOUXA a, A. MILONA a, L. CUISSARDA a
Lieu : a Service Hépato-gastro-entérologie CHAUVET, CHGM Saint Paul, RÉUNION ; b Clinique les Orchidées, Le Port, RÉUNION
* famille.belon@orange.fr
Conflit d’intérêt : Aucun
RÉSUMÉ
Introduction
A la Réunion, territoire insulaire avec peu de nouvelles contaminations, les traitements actuels de l’hépatite C, efficaces dans près de 100 % des cas, courts et bien tolérés, permettent d’envisager une éradication de la maladie. Il faut pour cela diagnostiquer les cas méconnus. L’étude des caractéristiques des patients dépistés récemment, probablement proches de celles des patients restant à dépister, pourrait permettre de mieux cibler les campagnes et messages de dépistage à venir.
Objectifs et méthodes
Tous les dossiers des patients ayant une sérologie VHC positive, vus avant le 31/12/2016, dans un des cabinets de gastro-entérologie ou dans le service d’hépato-gastro-entérologie du centre hospitalier (St Paul) du secteur Ouest de la Réunion ont été revus rétrospectivement.
Les données suivantes ont été colligées :
- Age,
- sexe,
- lieu de naissance,
- génotype,
- date du premier diagnostic de l’hépatite,
- caractéristiques de la contamination.
Les caractéristiques des patients diagnostiqués pour la première fois après le 01/01/2011 (Groupe REC = récent) ont été comparées à celles des patients dont le diagnostic était plus ancien (Groupe ANC = ancien).
Résultats
412 dossiers ont été colligés. L’hépatite C avait été diagnostiquée pour la première fois après 2011 chez 79 patients (19%). Les patients du groupe REC, d’âge moyen 54 ans (+/-10) étaient des femmes dans 58 % des cas (46/79), nés dans la zone Océan indien (ZOI) dans 72 % des cas dont 48 % de natifs de la Réunion (RUN) (Autres iles de la ZOI = 24 % surtout Madagascar 19%) et en métropole (MET) dans 27 % des cas. Chez les 333 patients du groupe ANC (45 % de femmes), la répartition des lieux de naissance était différente : ZOI 39% dont 24 % de natifs de la RUN et MET dans 54 % des cas. Un antécédent de toxicomanie (TOX) était retrouvé dans 40,2 % des cas dans le groupe ANC (134 cas/333) contre seulement 17,7% des cas dans le groupe REC (14/79). Un antécédent transfusionnel (TRANSF) était retrouvé dans respectivement 22,8 % (REC) et 25,5% (ANC) des cas. L’absence de ces 2 principaux facteurs de risque de contamination était 2 fois plus fréquente dans le groupe REC (63%) que dans le groupe ANC (35,1 %).
Conclusion
Les patients VHC+ diagnostiqués après 2011 dans l’Ouest de la Réunion, sont surtout des femmes (58 %) et ont un âge moyen de 54 ans. Ils sont près de 3 fois sur 4 originaires de la zone Océan indien et près de la moitié de patients sont nés à la Réunion. Ces caractéristiques sont très différentes de celles des patients VHC+ diagnostiqués avant 2011 que nous avions d’ailleurs déjà décrits antérieurement (JFHOD 2012). Les facteurs de risque majeurs et habituels de contamination (TOX ou TRANSF) ne sont plus retrouvés que dans environ 1/3 des cas récents. Les campagnes de dépistage à venir, à la Réunion, devront tenir compte de ces données nouvelles.
OBJECTIF DU TRAVAIL et METHODES
Décrire les caractéristiques (démographie, origine, principaux modes de contamination) des patients pris en charge dans le territoire Ouest de la Réunion, ayant une sérologie VHC + diagnostiquée > 1/1/2011 et les comparer à celles des patients diagnostiqués avant cette date.
Etude rétrospective : tous les dossiers des patients ayant une sérologie VHC positive vus en consultation ou en hospitalisation dans le service d’hépato-gastro-entérologie du centre hospitalier Gabriel Martin, Saint Paul de la Réunion ou par un des 2 gastroentérologues libéraux du secteur avant le 31/12/2016 ont été colligés et inclus. Les éléments suivants ont été recueillis : Age, sexe, lieu de naissance, mode de contamination présumé, date du premier diagnostic de l’hépatite C, génotype. Statistiques réalisées avec test Chi2.
RESULTATS
412 Patients
245 patients avaient été colligés au 31/12/2010 et leurs caractéristiques rapportées antérieurement (1). Depuis le 01/01/2011, 167 dossiers complémentaires répartis ainsi :
- 79 patients (19,2%) avec une hépatite C diagnostiquée pour la première fois après le 1/1/2011 = groupe REC (récent).
- 88 patients diagnostiqués VHC + avant 2011 mais qui n’avaient pas été vus dans notre centre auparavant ou avaient été « oubliés » dans l ’étude de 2010 compte tenu du caractère rétrospectif du recueil.
Les caractéristiques des 79 patients du groupe REC ont été comparées à celles des 333 patients diagnostiqués avant 2011 (Groupe ANC = ancien)
Répartition par sexe
Prédominance masculine avant 2011 (ANC) :
55% d’hommes (183/333).
Après 2011 (REC) prédominance féminine (46/79 soit 58% de femmes)(p =0,034).
Age moyen :
hommes 55,7 ans(+/-7,5) et femmes 56,5 ans(+/-9,9).
Répartition selon le lieu de naissance
Après 2011 (REC) : 72 % (55 sur 76)(*) de natifs de la zone Océan indien (OI)
Avant 2011 : majoritairement des patients originaires de France métropolitaine (MET)(57,6%) et « seulement » 42 % originaires de OI (p<0,0001).
Tableau 3 : lieu de naissance des patients originaires de OI (MAD= Madagascar, RUN = Réunion)(**). 48% des patients du groupe REC natifs de la Réunion (RUN) contre seulement 25% dans le groupe ANC (p < 0,0001)
(*)Pour 3 patients du groupe REC, lieu de naissance dans un autre pays ni OI ni MET
(**)) Dans les 2 groupes (ANC et REC), total MAD + RUN différent de OI en raison de l’existence de patients originaires d’autres îles de l’OI (Comores, Maurice)
Mode de contamination
Avant 2011 (ANC) : antécédent de toxicomanie (TOX) chez 40,2 % des patients et 1er mode de contamination.
Après 2011, seulement 17,7 % des patients TOX (p=0,00017).
Antécédent transfusionnel (TRANSF) chez respectivement 25,5% et 22,8% des patients des groupes ANC et REC (NS p=0,61).
L’absence de ces 2 principaux modes habituels de contamination était constatée dans respectivement 35,1 % et 63,3% dans les groupes ANC et REC (p<0,0001)
COMMENTAIRES
Nous avions montré en 2011, sur 245 patients (1) que les patients pris en charge pour hépatite C étaient originaires de la France métropolitaine dans plus de 50 % des cas (alors que les métropolitains ne représentent que 10 % de la population générale à la Réunion), que les antécédents de TOX étaient de ce fait la première cause d’hépatite C à la Réunion malgré la quasi absence de toxicomanie active sur l’Ile(1). Nos résultats actuels sur 333 patients du groupe ANC confirment ces résultats de 2011.
Les patients diagnostiqués pour la première fois après 2011 sont principalement des femmes, originaires de l’OI, et en particulier de la RUN, et sans doute sur des contaminations essentiellement iatrogènes anciennes.
Ces patients sont devenus prédominants car les »patients-types» décrits antérieurement ont majoritairement été déjà diagnostiqués avant 2011
(1)L’ hépatite C à l’ île de la Réunion : une pathologie importée dans 3/4 des cas et des profils de patients différents selon leur origine géographique L. Cuissard, H. Thurieau et coll.(Saint-Paul – RÉUNION), JFHOD 2011 CA 156
CONCLUSION
Les patients VHC+ diagnostiqués après 2011 dans l’Ouest de la Réunion, sont surtout des femmes (58 %) et ont un âge moyen de 54 ans. Ils sont près de 3 fois sur 4 originaires de la zone Océan indien et près de la moitié de patients sont nés à la Réunion. Ces caractéristiques sont très différentes de celles des patients VHC+ diagnostiqués avant 2011 que nous avions d’ailleurs déjà décrits antérieurement (1). Les facteurs de risque majeurs et habituels de contamination (TOX ou TRANSF) ne sont plus retrouvés que dans environ 1/3 des cas récents. Les campagnes de dépistage à venir, à la Réunion, devront tenir compte de ces données nouvelles.